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Cinquième période du dispositif CEE et perspectives de prix 
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Le décret décrivant les modalités de la cinquième période du dispositif CEE a été publié le jeudi 10 mai. Comme anticipé, l’obligation est en hausse passant à 2500 TWhc pour la période 2022-2025 contre 2133 TWhc pour la quatrième période (2018-2021). Côté offre, un bon nombre de bonifications seront supprimées dès le 1ier Juillet 2021, ce qui devrait complexifier la création de CEE.

 

A première vue, ces deux évolutions devraient avoir un impact haussier sur les conditions du marché des CEE et donc conduire à un prix des CEE plus élevé. Cependant, sur des questions aussi complexes que les perspectives de prix, il faut se méfier des premières impressions. 

 

Cet article se propose d’analyser les fondamentaux de la cinquième période. Nous allons aussi nous intéresser à son impact potentiel sur la facture des consommateurs. 

 

Les fondamentaux de la cinquième période et impact sur le prix 

 

Afin de mieux comprendre les perspectives de prix dans la cinquième période, nous allons nous intéresser à ce qui s’est passé pendant la quatrième période qui a commencé en 2018 et a pris fin en 2021. 

 

Si l’obligation totale du mécanisme augmente de 367 TWhc, cette augmentation est faible comparée à celle qui a eu lieu entre la période 3 et la période 4, soit +900 TWhc (l’objectif était à 700 TWhc en période 3 sur 2015-2017 et sur 3 ans l’objectif de la période 4 est de 1600 TWhc). Cette montée en puissance très forte a conduit à une grimpée rapide des prix des CEE. De moins de 4 euros/MWhc début 2018, le prix des CEE a atteint un niveau autour des 9 euros/MWhc en 2019-2020. 

 

Faisant face à un rythme de création limité en début de période et des obligés mécontents, le gouvernement a multiplié les dispositifs  “coups de pouce” et autres opérations bonifiées.  Ces dispositifs produisent des volumes de CEE plus importants que les opérations "normales" et permettent ainsi de financer une partie importante du coût de l’opération pour les bénéficiaires. C’est par exemple les fameuses opérations “isolation à 1 euro”ou encore les différentes opérations "chaudière à 1 euro”.

 

Leur accélération, surtout en fin de période, a permis de “booster” la production de CEE qui est passé de moins de 25 TWhc par mois début 2018 à plus de 70 TWhc par mois fin 2020.  

 

Cette accélération de rythme a permis non seulement de rendre l’objectif de la période 4 atteignable mais aussi de le dépasser. Ce rattrapage de l'offre a entraîné une forte baisse de prix sur le début de l'année 2021, les CEE chutant à 7 euros/MWhc fin janvier.

 

La réduction des coups de pouce concerne notamment la suppression au 1er juillet 2021 du coup de pouce chaudière fioul vers chaudière gaz, ancienne chaudière gaz vers chaudière gaz THPE, convecteurs électriques performants et partiellement du coup de pouce 

isolation (prolongé jusqu'à juin 2022 mais dans des conditions financières nettement dégradées. Les coups de pouce maintenus concernent "les bonifications pour le remplacement d'un chauffage aux énergies fossiles (fioul et gaz) par des énergies renouvelables et les bonifications pour la rénovation performante des logements sont prolongées jusqu'en 2025", 

 

Sur le papier, ces réformes devraient réduire notablement la production de CEE. Il est d'ailleurs à noter que les prix des CEE sont légèrement remontés à partir de mi-avril passant  à environ 7,3 euros/MWhc. Toutefois, cette réaction semble limitée, cette remontée semble d’ailleur déjà ralentir. Pourquoi ce manque d'impact? 

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Evolution récente des prix spot des CEE  classiques et précarité, source C2E Market

 

Nous avons interrogé Marc la Rosa et Olivier le Marois, afin d’avoir leurs perspectives sur cette question. Ils sont cofondateurs de la plateforme d’échange C2E Market. L’objectif de cette plateforme étant de permettre aux acteurs des CEE d'effectuer des transactions de manière digitalisée et d'accroître ainsi la transparence du prix des CEE et la liquidité du marché. 

 

Pour eux l’explication derrière ce manque de réaction du prix, est que les acteurs (obligés, mandataires,etc.), anticipant une hausse de l'homologation plus importante, potentiellement en ligne avec le scénario médian  de l’ADEME à 3000 TWhc, ont fortement  industrialisés leurs capacités à produire des CEE et devrait donc maintenir un rythme de production élevé malgré la disparition de certaines bonifications.

 

Un autre point intéressant de la période 5 est le recentrage des CEE précarité sur les ménages en situation de précarité énergétique "grave". Lors de la période 4 , la génération de CEE précarité avait été si importante que le prix des CEE classiques et précarité était sensiblement le même. Depuis quelques mois par contre un “spread” est apparu en réponse à  ces contraintes supplémentaires, surtout sur les échéances de livraison un plus lointaines. Le prix des CEE précarité est ainsi dans une situation de “contango” marquée depuis début mai.

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Evolutions du prix des CEE précarité, spot vs. S1 2022, source C2E market

Impact sur la facture des consommateurs 

 

L’impact de la période 5 sur la facture des consommateurs ne se limite pas à des considérations sur l'évolution des prix des CEE. Il faut aussi prendre en compte comment l'obligation totale a été ventilée entre les différentes énergies. Et là on obtient un portrait assez contrasté, les coefficients d'obligation, servant à la conversion MWhc en volume d’énergie consommé, ont évolué de façon très différentes selon les énergies. Par exemple: +50% pour le gaz et le fioul, -10% pour l'électricité. Les énergies fossiles vont donc porter un coût des CEE relativement plus forts. 


 

Enfin, tout le monde ne paye pas de CEE dans sa facture d’énergie. En effet, il existe un seuil  d'obligation d’actuellement 400 GWh/an. Un fournisseur n’achète des CEE qu’au-delà de cette franchise. I.e. les petits fournisseurs ne payent donc souvent pas de CEE et ne les facturent pas non plus à leur consommateurs, ce qui leur donne un avantage en prix. 

 

Certains fournisseurs ont aussi multiplié les autorisations de fourniture afin de bénéficier de cette franchise de multiples fois. En période 5, ce seuil va diminuer passant à 300 GWh en 2022, 200 GWh/an en 2023 et 100 GWh/an pour 2024 et après. Ce seuil plus bas va donc diminuer le potentiel d’optimisation qu’il générait et augmenter certaines factures résidentielles et tertiaires. 

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